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Channel: Accès au droit – Sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam – représentant les Français établis hors de France
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Intervention à l’AFE sur les déplacements illicites d’enfants

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AFE_comloisA l’occasion de la session de printemps de l’Assemblée des Français de l’étranger, sa commission des lois a souhaité une nouvelle fois m’auditionner, cette fois-ci sur le dossier des déplacements illicites d’enfants, dans le cadre de la préparation du rapport de Michèle Goupil, élue d’Argentine et représentant l’Amérique latine à l’AFE, que je remercie pour son implication.

En droit international, le déplacement illicite d’enfant est l’enlèvement d’un enfant par l’un de ses parents au-delà d’une frontière. Il s’agit hélas d’un délit qui se répand, au fur et à mesure que le nombre de couples mixtes – et donc de divorces transnationaux – augmente. Divers textes internationaux, et notamment la Convention de la Haye et le règlement européen Bruxelles II bis, sont censés organiser le règlement de tels litiges et permettre le retour de l’enfant dans son pays de « résidence habituelle ». Mais cela est loin de suffire à apaiser certains conflits parentaux particulièrement violents. Un déplacement illicite est le tragique aboutissement de l’incapacité des parents à s’accorder sur un droit de garde et de visite équilibré, dans les cadres fixés par le droit national et international.

Il me semble essentiel de garder en tête ce lien étroit entre la capacité à faire respecter ses droits de parent dans un pays donné et l’acte de l’enlèvement parental. Car si dans certains cas on assiste bel et bien au coup de force d’un parent décidant de soustraire l’enfant à l’autre pour le ramener dans son propre pays, dans d’autres cas certains parents commettent un déplacement illicite par méconnaissance du droit, sans se rendre compte de la gravité de leur acte, ou bien par désespoir de se voir reconnaître le moindre droit parental dans le pays de résidence habituelle de son enfant.

L’application « froide » et « technique » du droit fait parfois des ravages car in fine, c’est en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant qu’il faudrait pouvoir trancher. L’intérêt supérieur de l’enfant, et en particulier son droit d’entretenir des contacts avec ses deux parents, inscrit dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, devrait être placé au-dessus des autres règles déterminant le droit de garde ou de visite.

Si le cadre légal international a le mérite de permettre aux autorités de prévenir et réprimer les déplacements illicites, il laisse, en pratique, une marge d’interprétation et de mise en œuvre importante, d’où des politiques en matière de maintien du contact de l’enfant avec ses deux parents très fluctuantes d’un pays à l’autre. Tout en respectant l’indépendance de la justice et la souveraineté des Etats, il est essentiel que notre gouvernement et notre administration s’investissent pour mieux informer et épauler leurs ressortissants qui sont confrontés à de tels drames et s’impliquent pleinement dans le développement du droit  international et européen de la famille, encore trop embryonnaire et hétérogène.

Pour ce faire, j’estime que tous les acteurs (juges, avocats, autorités parentales, agents consulaires) gagneraient à être davantage sensibilisés aux enjeux de la détermination de l’autorité parentale à l’international et de la spécificité de sa déclinaison dans divers pays. J’avais ainsi demandé dès 2007 à ce qu’une formation en droit international de la famille soit délivrée à l’école de la magistrature à ce que soient nommés dans toutes les cours d’appel un magistrat compétent en matière de déplacements internationaux d’enfants.

De même je trouve dommage que l’autorité centrale française limite son rôle à celui de courroie de transmission de dossiers aux autorités étrangères, alors qu’elle pourrait avoir un rôle beaucoup plus actif dans l’accompagnement et le conseil des familles. Il semble que certains pays, comme les États-Unis ou l’Allemagne, aient mieux réussi que la France à établir autour des parents concernés un réseau d’entraide et de soutien. Le fait que des familles aient perdu toute confiance dans la capacité de la France de les accompagner est parfois un véritable « pousse-au-crime »…

La suppression de l’autorisation de sortie du territoire pour les mineurs par une circulaire du 20 novembre 2012 est, un autre exemple concret de la responsabilité étatique en matière de prévention des déplacements illicites : elle a permis à tout mineur de quitter le territoire français sans être accompagné de ses parents et sans même exiger que ces derniers ne soient simplement informés. Heureusement, une proposition de loi de Marc Le Fur pour la rétablir a récemment été votée à l’Assemblée nationale pour la rétablir, et devrait être très prochainement discutée au Sénat.

Pour plus d’informations :


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